Les tabous

Publié le 13 décembre 2025 à 06:24
tabous

Tabou : ce sur quoi on fait silence, par peur, par pudeur ou par habitude.

 

Nous avons beau vivre au XXIᵉ siècle, certains sujets demeurent entourés d’un silence tenace. Ils restent délicats, presque intouchables, chez de nombreuses personnes, comme si le temps n’avait pas suffi à les apprivoiser. J’y vois là un problème car les conséquences sont parfois désastreuses.

La liste des tabous modernes est longue : sexualité, argent, réussite, mort, problèmes sociétaux…On préfère garder le silence, comme si ne pas en parler suffisait à les faire disparaître. En réalité, ce mutisme est un luxe que l’on ne peut plus se permettre. Nos sociétés ont besoin de conversations franches pour avancer.

 

L’objectif n’est évidemment pas de parler de sexualité à tout-va ni d’imposer des contenus inadaptés à l’âge des enfants. Je reste d’ailleurs réservée face à certains programmes (comme EVARS) qui, selon moi, abordent trop tôt et trop crûment ces questions et risquent de créer plus de confusion que de compréhension chez les plus jeunes. En revanche, ignorer totalement le sujet avec ses propres enfants est, à mon sens, dangereux. Une éducation sexuelle adaptée, progressive et bienveillante est essentielle pour prévenir des conséquences parfois dévastatrices : violences faites aux femmes, grossesses non désirées, IST…Parler de ces sujets avec ses enfants, c’est leur offrir des repères, des protections et une meilleure compréhension d’eux-mêmes et des autres.

 

Que se passe-t-il autour de l’argent ? Pourquoi ce sujet reste-t-il aussi sensible alors qu’il fait partie de notre quotidien ? En France, le rapport à l’argent est souvent compliqué : on se méfie facilement de ceux qui gagnent beaucoup. Cette suspicion crée parfois un malaise chez les personnes qui réussissent financièrement, au point de les pousser à taire leurs revenus par crainte d’être jugées ou perçues comme arrogantes. À l’inverse, ceux qui gagnent peu hésitent aussi à se dévoiler de peur d’être étiquetés, dévalorisés ou renvoyés à leur situation économique. Ainsi, l’argent devient un terrain miné où chacun avance avec prudence, en faire un sujet embarrassant ne fait qu’entretenir la honte et la culpabilité.

 

Je voudrais également évoquer un tabou particulièrement coriace : la mort. Il est compréhensible que l’idée de la regarder en face suscite la peur, tant elle renvoie à notre finitude. Pourtant, elle fait pleinement partie de la vie. Refuser d’y penser ou de « préparer » son départ peut, le moment venu, ajouter des difficultés pratiques et émotionnelles à la peine déjà éprouvée par les proches.

 

Les tabous ne font pas que réduire nos conversations : ils alimentent, en silence, la peur et la haine. Ce que l’on n’ose pas aborder devient rapidement terrain de fantasmes, de rumeurs et de jugements. Quand un sujet reste dans l’ombre, il est plus facile d’en avoir une vision déformée, de s’en méfier ou de condamner ceux qui y sont liés. Les tabous tissent ainsi un climat où l’incompréhension grandit, où les préjugés se renforcent, et où la haine trouve un terreau fertile. Parler, au contraire, c’est éclairer. Et ce que la lumière révèle, la peur a beaucoup plus de mal à s’en nourrir.

 

J’y vois là un véritable problème : lorsque des sujets restent tabous, leurs conséquences s’aggravent dans le silence. Ne pas en parler, c’est empêcher la prévention, freiner la compréhension et laisser les individus seuls face à leurs questionnements. Le tabou devient alors un cercle vicieux, nourri par la peur qu’il engendre. Le silence étouffe les débats, empêche la transmission, nourrit la honte et laisse prospérer l’ignorance. Tant que certains sujets resteront interdits, les mêmes erreurs continueront de se répéter dans l’ombre.

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